OPUS II - RÉSIDENCE FLUVIALE

« Ils s’en allaient gouter à une autre ville »

La Seine - Le Havre, Caudebec-en Caux, Duclair, Rouen
Du 24 mai au 30 mai 2021

Ce moment d’échange s’inscrit comme un laboratoire d’idées autour de l’oeuvre de Mongo Beti et plus particulièrement de la revue Peuples noirs – Peuples Africains (1978-1991). Les artistes participants remontent la Seine en péniche du Havre à Rouen. Outre la symbolique forte et très présente de la rivière dans Ville cruelle, la Seine, axe de communication fluvial majeur, est au coeur de l’histoire de la Normandie et de sa rencontre avec le continent Africain. Ce parcours fluvial rassemble artistes, commissaires et acteurs de la création contemporaine autour de réflexions entamées par l’oeuvre de Mongo Beti. Au terme de cette traversée, une restitution sera réalisée dans différents lieux d’arts partenaires de Rouen Métropole et à la Cité internationale des Arts à Paris.

Artistes

JEAN-MICHEL DISSAKÉ (CAMEROUN)

BECKY BEH (CAMEROUN)

BEYA GILLE-GACHA (FRANCE)​

Euridice kala (Mozambique) & Teo Betin (France)

Z (Tunisie)

Hervé Yamguen (Cameroun)

Alain Polo (RDC)

JEAN-MICHEL DISSAKÉ (CAMEROUN)

Jean Michel Dissaké, né en 1983 à Yaoundé (Cameroun), est un peintre, sculpteur et scénographe autodidacte. Il réside et travaille à Yaoundé. Son identité artistique se construit petit à petit. Elle est aussi bien influencée par l’immersion qu’il a faite dans les profondeurs ancestrales que par l’harmonie entre les éléments touffus et enchevêtrés qu’il a découverte dans la nature. Ainsi, les oeuvres de Dissaké sont réalisées par tissage, assemblage et entrelacement d’objets et matières d’essence naturelle ou habitées par un usage préalable. Ses sculptures, ses tapisseries sculpturales, ses créations de mode non-vestimentaires sont fabriquées avec des matériaux prélevés ici ou là : liane, bois, argile, terre, poussière de termites, écorces, tissus récupérés (couvertures de laine, sacs en toile de jute..), fil de toutes textures (plastique, laine), papiers journaux usagés, métal (pièces d’aluminium de formes et formats divers, plaques d’immatriculation, composants électroniques )

BECKY BEH (CAMEROUN)

Installation autour de l’oeuvre de Mongo Béti parcours dans l’univers et les ouvrages accompagnés de bandes sonores et vidéos. Travail de construction avec l’artiste Mo Laudi. Née Douala au Cameroun en 1983, Becky BEH est une artiste pluridisciplinaire exerçant la musique et le théâtre. Après l’obtention d’une licence en sociologie option population et développement, elle décide de vivre de sa passion, elle est chanteuse de cabaret, puis vire dans la recherche musicale (blues jazz, funk, afro…) et en même temps suit une formation au jeu d’acteur. elle participe à la création de plusieurs pièces de théâtre (« MEDEE MATERIAU » de Heiner MÜLLER, « LE PETIT PRINCE » adaptation et mise en scène de Martin AMBARA, « AL MUSTAPHA » d’âpres « le prophète » de KHALIL GIBRAN ; carte blanche aux Récreatrales 2O12 à Ouagadougou, « LES BRIGANDS » de Friedrich SCHILLER (adaptation dont elle participe à la dramaturgie) joué au laboratoire de théâtre de Yaoundé, puis repris au Theater Hagen et au Theater and der Ruhr en Allemagne, « DEICIDEMENT GILGAMESH » une reprise de l’épopée de « GILGAMESH ». Elle participe à la création musicale de ces pièces) Elle travaille aussi avec Éric Delphin KWEGOUE (confessions de femmes, Eves déchainées), Eva DOUMBIA (avec qui elle ira en Avignon en 2014. Puis 2018 aux Récreâtrales à Ouagadougou sur la création du spectacle « PROSPERO » de Dieudonné Niangouna. En elle est lauréate du programme « Visa pour la création » de l’institut français pour son projet « LA FUREUR À UN À L’HEURE » inspiré de l’oeuvre de Mongo BETI. Et en 2020 elle lance et dirige la première édition du festival part ‘âges ; rencontre des arts de la parole. Becky BEH est aussi la directrice artistique de la Compagnie Rouge.

Beya Gille-Gacha (France)

Mon travail plastique se base principalement sur la représentation du corps et la ré-appropriation des iconographies anciennes, déplacés dans une application contemporaine. Le rapport au corps et à la peau est prépondérant dans ma pratique. Moulant des individus déjà connus ou rencontrés, recherchés, et choisis en ce qu’ils incarnent l’œuvre par leur personnalité ou leur histoire, c’est au contact du corps et de la peau de l’autre que commence la réalisation d’une pièce. Je génère l’épiderme de mes sculptures anthropomorphes à partir de l’art du perlage Bamileke (Cameroun), qui est l’art de recouvrir un mobilier de perles de verre, afin de faire montre de son statut social, comme le recouvrir d’or. Ma démarche fut de dévoyer ce sens matérialiste pour développer davantage une pensée humaniste : repositionner la place du vivant face à celle de l’objet, mettre en valeur l’être en faisant de la perle sa peau. Mon travail entre également en dialogue avec une iconographie hellénistique largement diffusée au monde et dont le langage visuel est devenu langage commun. Par ma pratique, je rejoue les codes et les mythes de la Grèce ancienne en les associant à d’autres imaginaires et cosmogonies pour faire émerger de nouveaux récits, ancrés dans le présent. Utilisant le corps comme métaphore de l’esprit, la mystique / la science, la littérature / l’oraliture, l’histoire / la mémoire, la psychologie / les injustices sociales, sont pour moi autant de sources qui me permettent de construire le propos d’une pièce, car il s’agit bien pour moi de mettre en scène, de raconter par l’image, de construire des allégories. J’appréhende aussi le corps comme un prolongement de l’esprit. Ainsi, la magie est une partie importante dans mon travail, mais souvent invisible comme les libations que je peux réaliser sur mes sculptures. Je développe par ailleurs une série de «  dessins guérisseurs  », des portraits dans lesquels j’appose, à la place des pigments, des mixtures issues de plantes ou autres éléments naturels, des savoirs issus de la pharmacopée, comme lors d’une pratique rituelle libératrice faisant écho à la diversité des médecines hollistiques. Je travaille également sur des installations immersives et sur une série de courtes vidéos expérimentales qui se conçoivent comme des contes philosophiques visuels ou encore des métaphores d’expériences spirituelles. L’idée de transcendance est peut-être ce qui gouverne ma recherche intellectuelle et artistique, ambivalente et empreinte des tendances « claires-obscures » qui m’habitent.

Euridice kala (Mozambique) & Teo Betin (France)

Mon travail entame des périodes de recherche, d’écriture, et puis une production artistique qui suit les intentions de cette recherche. Ce que je demande à l’audience, c’est d’engager leur humanité avec les œuvres que je laisse dans l’espace d’exposition. Elles sont comme des outils pour arriver dans un lieu de partage, de vulnérabilité, de réflexion, de transparence… En travaillant avec le verre et les miroirs je convoque une matérialité qui représente à la fois une fragilité et une force, comme un risque que je cours, je me sens toujours à la limite du danger. Je me dis que finalement, l’audience, le collectionneur/collectionneuse, l’institution prend aussi un risque en allant vers cette histoire Universelle que moi – une femme – une femme noire- une femme mozambicaine – une femme marié avec un homme blanc – une femme mère d’un enfant mélange – essayes de raconter. Donc je décrirais mon travail comme ‘un risque’. Euridice Zaituna Kala est une artiste mozambicaine basée à Paris. Son travail artistique s’intéresse aux métamorphoses culturelles et historiques, à ses manipulations et ses adaptations. L’artiste cherche à mettre en lumière la multiplicité des périodes historiques et des relations sociales depuis une perspective du continent africain qui est au cœur de ses réflexions. Ces récits se déroulent dans les espaces de départ, de rencontres…sous la forme d’installations, de performance, d’image et de livre.

Z (Tunisie)

HERVÉ YAMGUEN (CAMEROUN)

Né en 1971 à Douala (Cameroun) où il vit et travaille, son champ d’expression est aussi bien l’écriture (plusieurs publications) que les arts plastiques. Il a fait quelques incursions dans la photographie et la performance qu’il a surtout effectuée dans l’espace public. Il réalise régulièrement des scénographies pour le théâtre et a conçu et accueilli les premières scénographies urbaines à New-Bell, un partenariat entre Scur’k et le Cercle Kapsiki, un collectif d’artistes qu’il a co-fondé. Le cercle a ouvert, à New-Bell, la K Factory un lieu de résidences d’artistes transdisciplinaires, une galerie d’art contemporain, et a animé ce quartier par plusieurs évènements artistiques de haut niveau. Un manifeste de son engagement politique, artistique et social dans son quartier et son pays. Récemment intronisé notable dans le village de son père, il renoue avec les codes des rituels et coutumes, tout en conservant sa posture d’artiste contemporain.

Alain Polo (RDC)

Alain Polo est un artiste plasticien ayant fait ses études à l’Académie des Beaux-Arts de Kinshasa. Il a été membre d’un collectif appelé SADI (Solidarité des Artistes pour le Développement Intégral). Leur travail collectif porte sur des performances dans des quartiers populaires de Kinshasa et sur le « village de l’érosion » de Mont Gafula, dont les maisons s’écroulent à chaque grande pluie. Ils peignent sur des pans de murs isolés et des maisons sur le point de s’effondrer. Photographies, performances, vidéo sont les principaux supports de création d’Alain Polo, n’hésitant pas non plus à s’amuser avec la mode. Les premières séries photographiques d’Alain Polo réalisées en 2008-2009 (’Jeune Homme à la Veste’ 2008, ’Le Dormeur’ 2009, ’My Sweet Drawing’ 2009, ’Talon Aiguille’ 2009), sont un travail d’autoportrait révèlant un moment intime de doute sur son identité. Il attendra 2 ans avant d’oser montrer ces photographies et, en quelque sorte, accepter sa propre réalité, même s’il aime son image. Les cadrages ne laissent voir que des morceaux de corps désarticulé dans l’atmosphère sombre de sa chambre à peine dévoilée. Quelques éléments d’apparat et objets quotidiens le rapprochent d’une réalité fantasmée, souvent prise d’un monde pour lui imaginaire vu dans des magazines. Les reflets dans les miroirs cassés de sa propre image bouleversée ouvrent sur d’autres vertiges que la société congolaise ne comprend pas toujours. Il poursuit son travail en transformant des images des réseaux sociaux où il semble se reconnaître lui-même. Dans un travail plus récent, il met en confrontation des objets de la société bien pensante vis à vis de ses fantasmes. Sous l’apparence d’un jeune homme calme et enjoué, Alain Polo révèle une âme troublée qu’il veut libérer.